samedi 8 décembre 2012

Kabila, le M23, les occidentaux et l’enjeu crucial du gâteau congolais

December 4, 2012


L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu explique pourquoi le M23 n’a pas quitté Goma, démontre comment cette rébellion rwandaise n’est liée qu’à des inimités internes de la majorité présidentielle kabiliste autour du partage du gâteau congolais et rappelle pourquoi il est urgent d’informer les congolais sur les véritables enjeux de la guerre de prédation au Congo.


Sur le départ du M23 de Goma
Le M23 n’a pas quitté Goma, ne nous laissons pas berner par les images et les discours officiels. Le M23 est partout au Congo, parce que le M23, c’est le CNDP dont les membres se retrouvent aujourd’hui à Goma, à Kananga, à Lubumbashi, à Kitona, même à Kinshasa, partout.
Le M23 est membre à part entière de l’alliance pour la majorité présidentielle. Les liens qu’ils ont noués n’ont jamais été officiellement rompus.
Sur les négociations de Kabila avec le M23
Négocier avec le M23 ne veut rien dire. S’il négocie avec le M23, cela peut être interprété comme un échange interne pour l’alliance pour la majorité présidentielle. Cela ne concerne en rien le peuple congolais.
Et puis s’il faut négocier, il faut négocier avec les acteurs pléniers, les initiateurs de la guerre de basse intensité dans laquelle notre pays est plongé depuis les années 90. Négocier avec les marionnettes, rwandaises ou ougandaises, c’est un gaspillage énorme de temps.
Que ces gens arrêtent de se cacher dans l’ombre, qu’ils nous disent ce qu’ils veulent et qu’ils négocient avec les congolais dans leur majorité. Passer par des sous-fifres ou des pays satellites, cela n’a aucun sens.
Sur le jeu Kabila, Kagamé et Museveni
Est-ce que vous imaginez que notre pays est en guerre depuis les années 1990 et au moment où cette guerre devient intense, l’usurpateur à la tête du pouvoir congolais va rencontrer à huis-clos ses amis Kagamé et Museveni, qui sont les présidents des pays cités par les rapports de l’ONU comme étant les instigateurs et soutiens du M23.
Donc, tout ce qu’ils font est toujours tenu secret. C’est lorsque cela éclate au grand jour qu’ils essaient de donner des explications. Mais des explications simplement pour distraire et détourner l’attention des congolais des véritables problèmes auxquelles notre pays fait face depuis les années 90: son occupation, sa mise sous tutelle, la guerre de basse intensité soutenue par les élites dominantes anglo-saxonnes.
Sur les revendications du M23
Les membres de l’alliance pour la majorité présidentielle de Kabila se sont mal partagés le morceau. Il y en a aujourd’hui qui ont plus d’argent que d’autres, et cela crée des dissensions entre eux.
Ce qui se passe aujourd’hui avec ce M23 sont des inimitiés internes liées au mauvais partage du gâteau congolais tout simplement. Les Kabila, Bosco Ntaganda ont pris les gros morceaux, et les Makenga n’ont plus rien. Et se disent est-ce qu’il n’y a pas moyen de réajuster le partage de ce gâteau, qui nous appartient à tous?
Ecoutez le discours de ce “M23″, au même moment où ils disent que Kabila est un usurpateur qui a volé la victoire à Tshisekedi, ils disent également qu’ils veulent négocier avec lui. Et à leurs yeux, ce jeu paraît subtil, mais c’est un jeu de dupes. Parce que, ce qu’ils se disputent aujourd’hui c’est le morceau Congo qui est à l’Est, c’est le morceau Congo à Kinshasa.
Sur l’inutilité du parlement congolais
Comme ces messieurs là ne travaillent pas pour le pays, tout ce qui va dans le sens de la remise en question de leur orientation, ils ne l’acceptent donc pas.
Ces gens là ont créé une majorité pour pouvoir poursuivre leur participation à la mort lente de notre pays et au partage de ses ressources. Mais une bonne partie de nos compatriotes a compris le jeu et est en train de se mobiliser pour y mettre fin.
Sur le rôle des puissances occidentales
Le capitalisme est rentrée dans sa phase sénile, il a besoin de se rajeunir. Il recourt à la violence structurelle et à la violence brute. Les dégâts sociaux comme les morts qui peuvent se chiffrer à des milliers ou à des millions, importe peu pour le capitalisme dans sa phase sénile.
Ce qui compte, c’est le profit financier, peu importe le coût humain. il faut que nous comprenions que les petites mains du capitalisme ne pourront jamais s’apitoyer sur notre sort.
Relisez l’histoire, partout où ils ont opéré, ils n’ont jamais protégé la vie humaine. La protection de la vie humaine fait partie d’une certaine gauche qui ne fonctionne plus.
La gauche elle-même faisant aujourd’hui le jeu du capitalisme qui constitue la matrice organisationnelle sur laquelle reposent la droite et la gauche occidentale.
Donc, ne nous leurrons en espérant qu’un jour ces petites mains du capitalisme se disent qu’il y a eu trop de morts au Congo et qu’il faudrait qu’on arrête. Voilà la raison pour laquelle nous devons nous organiser pour dire non à ces acteurs pléniers.
Quand ces puissances disent que le Rwanda et l’Ouganda ne peuvent être sanctionnés, ils savent qui si jamais ces deux pays étaient sanctionnés et que certaines de leurs marionnettes arrivaient à parler, eux-même seront visés.
Ces puissances n’oublient pas leur histoire et sont prêts à tout pour la couvrir. Nous nous tombons facilement dans l’amnésie. La guerre qui se basse chez nous est une guerre de basse intensité orchestrée par les USA, la Grande-Bretagne et leurs alliés.
Ils ne couperont jamais la branche sur laquelle ils sont assis avoir de nous avoir écrasé et obtenu ce qu’ils poursuivent.
Sur le rôle des médias dominants
Les médias dominants sont les propriétés des multinationales. Or, il est prouvé à ce jour que la guerre de basse intensité soutenue par les petites mains du capitalisme est aussi la guerre des multinationales.
Comment voulez-vous que les médias aux ordres des multinationales puissent plaider la cause des Congolais?
Il y a urgence que nous puissons aller vers nos populations pour leur expliquer ce qui se passe réellement. C’est beaucoup plus facile dans la diaspora qu’au pays. Il n’y a rien à espérer de cette communauté internationale.
Sur les enjeux politiques de l’intensification de la guerre dans l’Est du pays
La question qui devrait nous préoccuper est celle de la vérité des urnes. Voilà qu’on a intensifié cette guerre de basse intensité du côté de l’Est pour détourner l’attention des Congolais de la question de la vérité des urnes et de la légitimité populaire. C’est comme cela que fonctionne le capitalisme du désastre.
Il procède par des destructions créatrices: on détruit la légitimité politique de nos compatriotes, qui avaient gagné aux élections de 2011 et on vous dit, non, maintenant le débat, c’est la guerre. C’est une distraction!
Quand vous relisez notre histoire, vous vous rendrez compte qu’à chaque fois, que nous congolais avons gagné le pari de nous diriger par nous-mêmes, on a toujours inventé quelque chose! La question de la légitimité ne se pose pas depuis hier ou avant-hier. Pourquoi ont-ils tué Lumumba? Parce que ce dernier avait une légitimité qui venait du peuple congolais.
Sur les suspensions d’aides au Rwanda
Si ces messieurs étaient sincères, ils demanderaient que l’on reconduise la plainte du Congo contre le Rwanda à la cour internationale de justice. Si, ces messieurs étaient sincères, ils citeraient le Rwanda au conseil de sécurité des Nations Unies, après avoir entendu le rapport du groupe des experts de l’ONU.
Ils ne sont pas sincères et ne peuvent l’être parce qu’ils sont lâches et cyniques, et préfèrent opérer dans l’ombre.

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